IdéesRéflexions

Faut-il avoir peur des nouvelles routes de la soie ?

Sébastien OUM, CEO de Ambriva, Spécialiste des opérations de Change pour les entreprises

En projet depuis 2014, les nouvelles routes de la Soie pourraient être un atout pour l’Europe et la France. Les liens diplomatiques entretenus entre Pékin et Paris, à l’heure où la zone euro connaît des difficultés, peuvent relancer l’économie occidentale. Pour autant, il faut définir les degrés de cette coopération. Mais aussi lever les craintes et attitudes défensives en France particulièrement. Des alliances stratégiques sont possibles.

Absente du G7, en pleine guerre commerciale avec les États-Unis et dont l’issue est incertaine, la Chine cherche un nouveau souffle en Europe pour maintenir son modèle économique mais aussi retrouver sa suprématie internationale. Depuis longtemps, ce pays cultive à travers le commerce, un art et une culture du dialogue. Il a été possible de le vérifier ces derniers jours par la visite du Président Macron au Président Xi Jinping.

Au-delà des formalités diplomatiques d’usage entre l’Orient et l’Occident, la stratégie du chef de l’Etat chinois laisse entrevoir sa détermination à mettre en œuvre les nouvelles routes de la Soie. Historiquement, il s’agissait d’un arc allant de la Chine jusqu’à l’Europe et qui englobait l’Asie du Sud-Est, le Moyen-Orient et une partie de l’Afrique.

En 2019, plus qu’un modèle géographique, Pékin cherche un mapping économique en partenariat avec les pays traversés, mais qui lui profiterait avant tout. Pourquoi ? Xi Jinping, qui a relancé ce grand itinéraire en 2014, veut investir l’Europe. En cela, contrecarrer le face-à-face qui l’oppose à Washington et prendre le leadership de l’économie mondiale. S’il y parvient, son pays sera le pôle majeur qui orchestrera l’ensemble. Aussi, le « Toit du Monde » veut, avec ce « grand itinéraire », inonder les marchés potentiels. Comment ? En raccourcissant les délais de livraison des matières et produits en direction du marché européen, tout en sécurisant l’acheminement. Plus encore que la quantité, il vise le haut de gamme, donc la captation d’une valeur plus forte.

Routes et convergences

Évidemment, la France est placée face à de nouveaux enjeux. Particulièrement le potentiel qu’elle peut développer en matière d’attractivité de ses territoires tout comme la compétitivité possible pour les entreprises françaises dans leur ensemble.  Les secteurs bénéficiaires sont identifiés : le transport et la logistique, les infrastructures numériques, le e-commerce et le tourisme. Il est vrai que sur le papier, la nouvelle route de la Soie paraît démesurée. Pourtant, trois routes sont possibles pour concrétiser cette ambition d’un deal « gagnant-gagnant » entre l’Orient et l’Occident.

Le maritime, qui va faciliter les échanges économiques par une durée et un coût réduit du transport. L’on pense ici à l’acheminement des matières premières, des produits agricoles ou du pétrole.

Le FRET, en les infrastructures et les services entre l’Europe et la Chine avec des wagons trains à conteneurs. Un système encore plus rapide que le merroutage et bien moins coûteux que l’aérien.

La voie digitale enfin, pour de nouveau flux capables de dépasser les réseaux existants et aller vers un marché digital autrement normé qu’avec les États-Unis.

Degré de coopération

Faut-il craindre ces nouvelles routes ? Elles peuvent être vécues comme un risque à terme et susciter une attitude défensive. On peut aussi les négliger, en pensant qu’elles ne changeront en rien la problématique commerciale mondiale. Or, la zone euro, qui connaît des disparités de croissance, a intérêt d’être à l’initiative. Le protectionnisme et le nationalisme allant bon train, la chute des carnets de commande se confirmant, la contraction devant une réalité de mois en mois, l’Europe comme la France ne peuvent stagner sur ce dossier, pour l’économie comme pour les PME et groupes internationaux.

Cela doit conduire la France à étudier des alliances stratégiques avec la Chine, privilégiant des relations de long terme. Cela doit se traduire par des contrats spécifiques à longue échéance ou par des projets communs. Pour autant, toutes les entreprises françaises et européennes ne pourront prétendre « monter à bord » des routes de la Soie. Celles qui ont le plus de chance, sont avant tout celles qui entretiennent déjà des échanges avec la Chine ou dont les dirigeants sont capables de parler chinois ou ont vécu dans le pays, développant des réseaux.

Nouvelle philosophie

Des précautions sont à prendre et de nouveaux usages sont à adopter pour performer sur ces « Routes ». Notamment, commencer par développer les capacités et pouvoirs de négociation au sein de l’entreprise. Identifier les solutions, produits et savoirs-faire qui pourront entrer dans un accord commercial ou de partenariat, à condition qu’ils ne soient pas copiables et/ou transférables. Il s’agira surtout d’investir des segments ou des niches. Enfin, pour que l’ensemble soit viable, un business modèle adapté aux Routes est fondamental.

En conclusion, ces nouvelles routes de la Soie, si elles tendent à renforcer l’avantage concurrentiel des firmes chinoises sur les marchés mondiaux, vont aussi ouvrir des opportunités en France dans quatre secteurs : logistique/transport, infrastructures numériques, e-commerce/plateformes B2B et tourisme. C’est donc une nouvelle partition qui s’ouvre pour notre pays qui observe les conséquences du Brexit et les répercussions de la guerre commerciale USA/Chine. Il ambitionne déjà d’accueillir 20 millions de touristes chinois par an d’ici 2020 ; compense essentielle de l’économie nationale.

L’esprit de conquête est très respecté en Chine, s’il est porteur d’initiatives. Il ne nous reste donc plus qu’à faire preuve d’audace. Ou bien alors, comme l’écrivait en son temps Alain Peyrefitte, « quand la chine s’éveillera, le monde tremblera ».

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Elliot

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